Casse-tête de la compatibilité entre fonction d’élu et d’agent dans les intercommunalités
Un élu municipal, a contrario d’un élu communautaire, peut être salarié au sein d'un EPCI à fiscalité propre dont fait partie sa commune — sous réserve qu’il n’exerce pas de fonctions de direction en son sein — ou être salarié d’une commune membre de l’intercommunalité et participer à des commissions intercommunales instituées par l'article L. 5211-40-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT).
Étant nécessairement issus de la liste des conseillers municipaux, les conseillers communautaires sont soumis aux mêmes règles d'incompatibilité que ces derniers (C. élect., art. L. 46 et art. L. 237 et s. ; CGCT, art. L. 2122-4 et art. L. 2122-5), ainsi qu’à des règles d’incompatibilité qui leur sont propres.
Les règles d’incompatibilités ont pour objet de prohiber l’exercice simultané de plusieurs mandats électifs ou celui d’un mandat et d’une profession ou d’une activité. Elles peuvent résulter aussi bien des règles applicables à ces mandats électifs qu’à celles relatives à la profession ou à l’activité en cause (CE, 28 déc. 2001, no236427, Élection du maire de Longeville-lès-Metz). Elles obligent l’élu qui y est soumis à effectuer un choix, sans pour autant que l’élection soit viciée, entre son ou ses mandats électifs et l’exercice d’une activité ou profession.
Par principe, les agents salariés communaux ne peuvent être élus au conseil municipal de la commune qui les emploie. Toutefois, ne sont pas concernés par ces incompatibilités, les fonctionnaires publics ou les professions indépendantes qui reçoivent une indemnité de la commune à raison des services qu’ils lui rendent dans l’exercice de leur profession ne sont pas concernés, de même que ceux qui, dans les communes de moins de 1 000 habitants, ne sont agents salariés de la commune qu’au titre d’une activité saisonnière ou occasionnelle.
Les fonctions de conseiller municipal sont notamment incompatibles, en application de l’article L. 237 du Code électoral, avec celles de préfet, sous-préfet ou secrétaire général de préfecture y compris hors du département où se situe la commune ; de fonctionnaire des corps de conception et de direction et de commandement et d’encadrement de la police nationale ; de représentant légal des établissements publics de santé, des hospices publics ou maisons de retraite publiques dans la ou les communes de rattachement de l’établissement où il est affecté.
De plus, en vertu du 8 o de l'article L. 231 du Code électoral, ne peuvent être élus conseillers municipaux dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois les personnes exerçant, au sein d'un EPCI à fiscalité propre ou de leurs établissements publics, les fonctions de directeur général des services, directeur général adjoint des services, directeur des services, directeur adjoint des services ou chef de service, ainsi que les fonctions de directeur de cabinet, directeur adjoint de cabinet ou chef de cabinet en ayant reçu délégation de signature du président.
Par ailleurs, des incompatibilités supplémentaires sont applicables aux conseillers communautaires. En effet, depuis la loi no 2013-403 du 17 mai 2013, le mandat de conseiller communautaire est également incompatible avec l'exercice d'un emploi salarié au sein de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI), du centre intercommunal d'action sociale (CIAS) ou de ses communes membres (C. élect., art., L. 237-1) ; étant précisé qu’un agent qui est en position de disponibilité à la date de l'élection n'est pas considéré comme salarié de la commune (CE, 17 juin 1991, nos 117855-117909, Élections municipales de Lodève). En revanche, le salarié d'un syndicat de communes pourra être élu conseiller municipal ou conseiller communautaire. Il ne pourra toutefois pas être désigné pour représenter la commune ou l'EPCI au sein de l'organe délibérant du syndicat dans lequel il est employé.
Se pose la question de savoir si un élu d'une commune membre d’un EPCI à fiscalité propre tel qu’une communauté de communes ou d'agglomération, et qui est par ailleurs agent territorial dans le centre intercommunal d'action sociale (dépendant de l’EPCI dont la commune est membre), pourrait être désigné par son conseil municipal pour siéger dans une commission communautaire territoriale ou thématique sans pouvoir décisionnel…
Dans la pratique, l’EPCI à fiscalité propre renvoie à chaque commune le soin de désigner un élu municipal afin de la représenter dans ladite commission.
Pour mémoire, selon les dispositions de l'article L. 5211-40-1 du CGCT, modifié par la loi no 2019-1461 du 27 décembre 2019 dite « loi Engagement et Proximité » : « Lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre forme une commission dans les conditions prévues audit article L. 2121-22, il peut prévoir la participation de conseillers municipaux des communes membres de cet établissement selon des modalités qu'il détermine ». Ces dispositions permettent ainsi d'associer davantage les élus municipaux ne bénéficiant pas d'un mandat communautaire, aux commissions intercommunales en assistant à ces réunions.
À cet égard, deux réponses ministérielles de la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales (Rép. min. no 13602 : JO Sénat, 26 déc. 2019, p. 6 327 et Rép. min. no 14457 : JO Sénat, 27 févr.. 2020, p. 946) viennent préciser qu’au regard des dispositions du Code électoral, si le mandat de conseiller communautaire est incompatible avec l'exercice d'un emploi salarié au sein de l'établissement public de coopération intercommunale ou de ses communes membres (art. L. 237-1), ainsi que le mandat de conseiller municipal avec l'exercice d'un emploi au sein même de la commune (art. L. 231), aucune disposition n'interdit à un élu municipal d'être salarié au sein d'une autre commune.
Un agent au sein d'un EPCI à fiscalité propre qui n'exerce pas une fonction de direction au sein de cet établissement peut donc être conseiller municipal au sein d'une des communes membres, sans toutefois être conseiller communautaire en respect des dispositions précitées de l'article L. 237-1 du Code électoral (Rép. min. no 08091 : JO Sénat, 6 déc. 2018, p. 6112).
Par ailleurs, les réponses ministérielles sont claires et univoques : « aucune disposition ne crée une incompatibilité entre le fait d'être salarié au sein d'une commune, élu municipal et participer à des commissions intercommunales en application du deuxième alinéa de l'article L. 5211-40-1 du CGCT » (Rép. min. no14457 : JO Sénat, 27 févr. 2020, p. 946).